Cet ami qui ne me quitte jamais

« Ce qui est bien avec toi, c’est que tu es toujours sûr de toi. »

Cette phrase, je l’ai entendue lors d’une formation en team building il y a environ quinze ans. L’exercice était simple : chacun devait dire une phrase sur un collègue. Et celle-ci m’était destinée.

Ça m’avait frappé. Parce qu’à l’époque, je vivais sûrement l’une des périodes les plus compliquées avec mon partenaire de vie. Ce partenaire qui m’accompagne depuis aussi longtemps que je me souvienne. Ce partenaire qui m’a trop souvent gâché des moments, empêché d’aller au bout des choses. Un meilleur ami qui s’est souvent mué en pire ennemi. Celui dont on aimerait se débarrasser, mais qui reste toujours là, quoi qu’il arrive.

J’ai nommé : mon stress.

Un masque trompeur

Cette phrase qui semblait anodine est sans doute l’une des plus troublantes qu’on ait dites à mon sujet.

Alors que j’étais continuellement en période de grand stress, entre crise d’angoisse continue et « hyponcondriaquie » chronique (oui j’invente des mots), incapable de passer une nuit sereine… et pourtant, cette collègue – une amie – pensait que mon plus grand trait de personnalité était ma confiance en moi.

Ce qu’elle voyait au travail était l’exact opposé de ce que je vivais à l’intérieur.

Depuis tout petit, j’ai toujours été stressé. Ma première peur remonte à un dessin animé : La Belle au bois dormant. Cette lumière verte hypnotique, qui attire Aurore vers le fuseau maléfique, me terrifiait. Ensuite sont venues les nuits blanches. Insomnies. D’abord quelques minutes sans sommeil, puis des heures, puis des nuits entières.

Le summum ? Un voyage en Turquie où je n’ai pas fermé l’œil pendant quatre nuits d’affilée. Dans ces moments-là, vous perdez la notion du temps, du jour et de la nuit. Vous n’êtes plus vraiment là. Si vous l’avez déjà vécu, vous savez. Sinon… vous êtes certainement incapable de l’imaginer.

J’avais 25 ans et il fallait agir! 

Je me suis toujours juré que mon stress ne m’empêcherait jamais de vivre. Mais là, il avait pris le dessus. Il était partout. Le matin, à mon réveil. La journée. La nuit, c’était son moment préféré. Alors j’ai décidé de me faire aider.

D’abord une psy. Puis une coach de vie – manière moins « problématique » d’appeler une psy. Et ainsi a commencé un long cheminement.

15 ans de combat… et d’acceptation

Quinze ans de rendez-vous. Quinze ans de réflexions, de petites avancées et de grandes rechutes. Parce que combattre son stress, c’est avancer par petits pas… et parfois reculer brutalement.

J’ai connu l’insomnie, les crises d’angoisse… Aujourd’hui, je suis hypocondriaque. J’ai déjà cru avoir, dans le désordre : des tumeurs, un début d’asthme, un problème au cœur, la sclérose en plaques, Parkinson, divers cancers.

En l’écrivant, j’éprouve une gêne. Je pense à ceux qui vivent réellement ces maladies. À vous qui lisez ce texte, je vous présente mes excuses sincères.

Aujourd’hui, où j’en suis ?

Je vais mieux. Mais je suis encore en thérapie. Tous les mois, je vois ma coach. Même quand je n’ai rien à dire, j’y vais. Parce que prendre une heure pour analyser son moi, ses angoisses, ses signaux d’alerte, c’est essentiel. Parce que le stress est un combat quotidien. Il faut écouter son corps. Mais sans tomber dans l’obsession hypocondriaque.

Un jour, j’ai accepté. Oui, je suis différent. Oui, j’ai des failles. Oui, c’est un combat. Et paradoxalement, accepter mon stress, c’était lui donner moins d’importance.

Aujourd’hui, j’en parle. J’assume d’aller voir quelqu’un. J’assume de ne plus cacher mes angoisses à mes proches.

J’ai changé. Certains me l’ont reproché. « T’es plus pareil. » Heureusement! Si, en quinze ans, je n’avais pas changé, ce serait inquiétant.

Mais je suis resté moi-même. S’accepter, se connaître, assumer ses défauts sans oublier ses qualités… C’est aussi ça, la clé.

Et puis, parfois, je regarde ma fille et je me vois en elle. Je sais qu’elle aussi devra vivre avec cet « ami imaginaire ».

La différence, c’est qu’elle m’a, moi. Moi 15 ans plus tard, des heures et des heures d’introspection. 

Je l’aide dans cette découverte, je la guide à ma façon. Nous le vivons ensemble. J’échange beaucoup avec elle, parce que, d’une certaine manière, c’est notre ami en commun.

Le stress n’est pas un ennemi… c’est une partie de nous

Nous sommes nombreux à avoir un « ami imaginaire » dont nous ne sommes pas fiers. Celui qui nous pousse à boire, à jouer, à prendre de mauvaises décisions.

Mais en réalité… ce n’est pas un ami imaginaire. C’est juste nous.

Le message que j’aimerais faire passer ?

Faites-vous aider. Parlez-en. N’ayez pas honte.

Ce choix a changé ma vie. Il m’a sauvé à un moment où je pouvais sombrer.

Ces rendez-vous ne sont pas toujours faciles. Mais ils sont nécessaires. Parce que réussir sa vie, ce n’est pas ne jamais tomber. Mais bien de toujours se relever et commencer à avancer. Et si jamais, c’est savoir demander de l’aide. C’est oser affronter ce qui nous ronge.

Et vous ? Avez-vous, vous aussi, un « partenaire de vie » que vous avez appris à apprivoiser ?

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3 Responses

  1. Mon humble avis. Tout le monde, (enfants et adultes) devraient consulter un psy ou coach de vie, même si en surface on pense qu’on va bien ! Même le psy ou le coach devrait consulter (car un humain reste un humain) tout au long de sa vie, en tout cas une très grande partie depuis jeune … Le problème c’est qu’on ne pense que c’est que qd on va mal … Hors déjà être en prévention c’est éviter d’aller mal ce serait déjà une bonne idée. Et puis pour peut être éviter certaines erreurs d’éducation même si « on ne voulait que ton bien tu sais… » Et puis, si on a pas eu cette possibilité de se rendre compte à partir de quand et quoi commence »la violence » parce que malgré nous, nous avons accepté d’être violenté parce que personne justement ne nous a montrer le chemin de la bienveillance envers nous mêmes….
    chacun a son ami-ennemi imaginaire ou plutôt l’enfant blessé qui est resté coincé dans notre corps d’adulte et qu’on appellera « stress » ou « anxiété » ou …. Merci pour l’article

  2. J’ai adoré ma dernière lecture pour m’aider à prendre du recul, le connu (de Mark Manson) : l’art subtil d’en avoir rien à foutre. Je suis certain que ça t’aiderait…amicalement.

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